Décret pigistes : il est temps , employeurs, d’assumer vos responsabilités

Il y a un an, la profession arrachait de haute lutte le décret du 16 avril, qui définit les critères d’accès au chômage partiel pour les journalistes rémunérés à la pige. Un mois après le début du premier confinement, les pigistes, laissés sur le bord du chemin depuis les annonces du président Macron, ont finalement pu avoir accès à l’activité partielle, malgré les pressions de la part d’employeurs qui ont tout fait pour minimiser la portée de ce décret, le rendre plus restrictif en demandant davantage de conditions, voire empêcher sa publication.

Un an après, quel bilan dresser ?

Encore aujourd’hui, le décret du 16 avril 2020 permet aux journalistes rémunérés à la pige de voir leur rémunération maintenue pendant cette crise sanitaire quand leur activité professionnelle est impactée (baisse ou disparition des commandes). Ce texte conforte la présomption de salariat en CDI du pigiste, que des employeurs voudraient bien voir disparaître, une présomption qui engage l’employeur à apporter à tout journaliste, quel que soit son mode de rémunération, les moyens moraux et matériels nécessaires à l’exercice de sa mission d’informer le grand public.

Si une majorité des employeurs de presse et de médias ont bien appliqué le chômage partiel aux pigistes éligibles, d’autres refusent toujours de le mettre en place, malgré nos alertes répétées auprès des employeurs récalcitrants eux-mêmes, des inspections du travail, des DIRECCTE, du ministère du Travail et du ministère de la Culture. Cette volonté de ne pas se conformer aux textes concerne des employeurs qui ont pourtant pignon sur rue et, pour certains, leur rond de serviette dans certains ministères.

Rappelons que le recours au chômage partiel ne leur coûte rien, et qu’il est de leur responsabilité morale de porter l’indemnisation à 100% du salaire habituellement perçu, dès qu’ils en ont les moyens.

La profession, confrontée à une crise sans précédent conjuguée à cette pandémie, continue cependant à se précariser. Alors que le président Macron annonçait à l’été 2020 une rallonge financière de près de 500 millions d’euros sur deux ans aux éditeurs de presse (en plus des traditionnelles aides directes à la presse estimées à 800 millions d’euros par an), un fonds de lutte contre la précarité, dotée de 36 millions d’euros, a été créé. Ce fonds n’exonère en rien les employeurs de leurs obligations d’assurer un maintien de rémunération aux pigistes, que ce soit par des commandes ou par le chômage partiel.Malgré de multiples réunions au ministère de la Culture, ce fonds n’est toujours pas activé alors que s’accroissent les difficultés des journalistes rémunérées à la pige n’entrant pas dans les critères du décret ou auxquels leurs employeurs ont refusé le chômage partiel.

Pire : sous la pression d’employeurs qui font miroiter à leurs collaborateurs pigistes un meilleur soutien du gouvernement aux indépendants, des journalistes ont abandonné le salariat et ont finalement opté pour le statut illégal d’auto-entrepreneur, afin de pouvoir joindre les deux bouts à la fin du mois.

Le SNJ, le SNJ-CGT, la CFDT-Journalistes et le SGJ-FO – auxquels s’associe l’association Profession : pigiste – somment les employeurs de presse et de médias de respecter les textes, le Code du travail et la convention collective. Leur responsabilité est engagée. La précarité pourrait être en partie résolue s’ils respectaient le droit.

Les organisations syndicales représentatives de journalistes et Profession : pigiste réaffirment que tout journaliste doit bénéficier de la présomption de salariat (loi Cressard – 1974), le statut d’auto-entrepreneur étant illégal, comme le paiement des journalistes en droits d’auteur, le CDD d’usage ou encore le recours au statut de correspondant local de presse. Seul le salariat permet au journaliste d’accéder à des droits plus protecteurs grâce à sa convention collective, indissociable du statut du journaliste professionnel.

Le SNJ, le SNJ-CGT, la CFDT-Journalistes, le SGJ-FO et Profession : pigiste demandent au ministère de la Culture de mettre les bouchées doubles pour répartir très rapidement le fonds de lutte contre la précarité. Malgré le décret du 16 avril et le chômage partiel, de nombreux journalistes ont perdu des piges, des rubriques, des contrats, leur emploi. Il y a urgence !

Le SNJ, le SNJ-CGT, la CFDT-Journalistes, le SGJ-FO et Profession : pigiste attendent avec impatience la publication du rapport Franceschini sur les critères d’attribution des aides à la presse, nos impôts. Il est plus que temps de conditionner ces aides à des mesures sociales et déontologiques, pour qu’elles contribuent réellement à garantir le pluralisme et la qualité de l’information. Les aides à la presse ne doivent pas servir à supprimer des emplois et engraisser les caisses des actionnaires.

Paris, le 15 avril 2021.

Les actualités

  • Déontologie journalistique : « Valeurs actuelles » allergique à la critique

    L’hebdomadaire « Valeurs actuelles » attaque en justice le Conseil de Déontologie journalistique et de Médiation (CDJM), qui avait estimé contraire aux règles déontologiques de la presse la publication d’un article raciste et injurieux visant la députée Danièle Obono. L’audience se tiendra le 2 février 2021. La CFDT-Journalistes, cofondatrice et membre active du CDJM, dénonce vigoureusement la démarche…

  • Lettre ouverte à la ministre de la culture : il faut rétablir la Délégation à la photographie !

    Lettre ouverte à madame Roselyne Bachelot-Narquin, Ministre de la Culture   Paris, le 25 janvier 2021     Madame la Ministre,   C’est avec la plus grande colère que les organisations du monde de la photographie ont découvert le nouvel organigramme du ministère de la Culture, qu’un décret confidentiel a mis en place le 31…

  • Grève à l’Equipe : la direction doit retirer son projet de PSE

    C’est une grève exceptionnellement longue qui se déroule au sein de la SAS l’Equipe, avec laquelle CFDT-Journalistes est solidaire pour obtenir le retrait d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) proposé par la direction qui prévoit notamment, au sein des différents titres du groupe (le quotidien et le magazine L’Equipe, Vélo magazine et l’hebdomadaire France…

  • Examinée au Sénat, la loi Sécurité globale toujours objet de manifestations

    CFDT-Journalistes appelle à rejoindre les cortèges qui se dérouleront ce samedi 16 janvier partout en France, afin d’exprimer un refus à la loi Sécurité globale. Les manifestations sont organisées par la coordination #StopLoiSecuriteGlobale, dont nous faisons partie. L’objectif, en ce qui nous concerne, est de faire supprimer l’article 24 de cette loi que nous jugeons,…

  • Préavis de grève à France Télévisions : non à la régionalisation à marche forcée

    Les organisations syndicales FO et CFDT de France Télévisions ont déposé un préavis de grève de 24h pour le lundi 18 janvier prochain. (Pour information le SNJ et la CGT en ont déposé un autre, illimité, lui, pour le même jour) La CFDT s’oppose au projet de régionalisation tel qu’il sera déployé dans les antennes…

Enable Notifications OK No thanks