Finis les comportements sexistes au travail : tolérance zéro à Radio France

Chaque 8 du mois la CFDT-Journalistes promeut un combat à mener pour  la place des femmes dans les médias. Ce 8 novembre, la bataille contre les violences sexistes et sexuelles à Radio France. Son délégué syndical Renaud Dalmar, particulièrement engagé pour qu’elles cessent, nous en explique le contexte et les leviers. 

 

Depuis quelques jours, des affiches colorées fleurissent sur les murs de la Maison de la Radio et de la Musique, à Paris, et dans les stations locales du réseau France Bleu. « Elle est énervée, elle doit avoir ses règles », « on n’est pas des pédés », ces slogans provocateurs illustrent une campagne interne contre le harcèlement sexuel et les comportements discriminatoires au sein de la société nationale de radiodiffusion.

La direction de Radio France veut susciter une prise de conscience et montrer que les temps ont changé. Plusieurs salariés de Radio France ont d’ailleurs été récemment suspendus, voire remerciés, après des années de comportement inapproprié, notamment à Bayonne, à France Bleu Pays Basque.

La direction encourage à parler

« Lors des deux dernières années, 16 sanctions disciplinaires ont été prises, dont cinq licenciements », précise un communiqué posté le 15 octobre 2021 sur le site intranet de Radio France.  « Que vous soyez victime ou témoin, n’hésitez plus à parler : toute personne qui signale ou témoigne est protégée, quel que soit son statut. Tout fait remonté donne lieu à une action. Des sanctions sont appliquées ».

La diffusion en mars 2021 sur Canal+ du documentaire de Marie Portolano, « Je ne suis pas une salope, je suis une journaliste », sur le sexisme dans plusieurs rédactions sportives, a donné un coup d’accélérateur à une évolution initiée en 2018 déjà avec la nomination d’un référent harcèlement sexuel, une responsabilité assurée actuellement par le délégué central CFDT Renaud Dalmar.

Des comportements enracinés

Devant le CSE central il y a un an, Renaud Dalmar évoquait des « comportements enracinés, peu contestés par le reste des salariés ». Des salariés, cadres ou non, témoins ou victimes, qui choisissent de rester silencieux par crainte des conséquences pour leur carrière ou pur leurs conditions de travail.

« A ce jour de nombreuses affaires ne peuvent être traitées car les victimes ne veulent absolument pas témoigner même anonymement, car ce témoignage risquerait de compromettre leur chance d’intégration », souligne le référent.

« C’est de l’humour ! »

Renaud Dalmar dénonçait aussi devant les élus du CSE central «une réelle pression caractérisée ». Les précaires, les nouveaux venus doivent se fabriquer une carapace. « Certains CDD, surtout des jeunes femmes, se sont vu répondre qu’elles ne seraient pas « capables de poursuivre dans cette voie si elles n’étaient pas capables d’apprécier cet humour ». Une sorte de « troisième degré », ne pas le comprendre révélerait une sorte de «déphasage avec le milieu professionnel ».

Renaud Dalmar constate « une défaillance managériale ». Cependant le délégué central CFDT reconnait que « l’encadrement est très démuni pour répondre à une partie des situations exposées. Il manque parfois de soutien. Il peut aussi se retrouver confronté à un fonctionnement très ancien et installé, contre lequel il est très difficile de lutter seul ».

La passivité complice

Il dénonce ce qu’il appelle la « passivité complice », c’est à dire « le fait de rire à une blague sexiste ou à connotation sexuelle. Il est dès lors très compliqué de dénoncer la situation. Dans l’une des stations pour lesquelles j’ai lancé une alerte, tel était le cas au quotidien : l’encadrement avait fait preuve de passivité complice, or nous pourrions dire aujourd’hui que la dégradation de la situation engageait sa responsabilité ».

La juriste et collaboratrice de la défenseure des droits, Sophie Latraverse, a été chargée de conduire une enquête sur les dérives signalées à Radio France. Son rapport, publié en septembre 2021, confirme les inquiétudes des élus. Cette juriste indépendante a pu s’appuyer sur 80 entretiens. Elle a aussi eu accès aux enquêtes menées ces deux dernières années en interne par les services RH.

Un dispositif d’alerte pour repérer les dérives sexistes

Pour lutter contre ces dérives, Radio France a développé plusieurs outils, comme des « conférences théâtralisées » qui proposent aux équipes de se glisser dans la peau d’une victime ou d’un collègue témoin de harcèlement sexiste. La société propose aussi une formation en ligne sur cette thématique, que chacun peut suivre en moins d’une demi-journée.

Un dispositif d’alerte interne en ligne a également été mis en place, ainsi qu’une messagerie dédiée aux alertes. Enfin, à la demande des syndicats, la direction de Radio France s’est engagée à communiquer davantage sur les enquêtes en cours et sur les sanctions infligées aux salariés qui ne respectent pas leurs collègues.

 

Lire le communiqué CFDT Radio France du 6 octobre 2021 : Violences sexistes et sexuelles au travail : nous sommes sur la même longueur d’ondes Madame la présidente

 

 

 

 

Télécharger l’outil de la Fédération Communication conseil culture CFDT pour évaluer sa propre exposition aux  violences sexistes et sexuelles au travail 

 

 

 

 

Lire tous nos articles publiés le 8 de chaque mois, afin de faire vivre toute l’année les droits des femmes, et pas seulement le 8 mars.

Les actualités

  • La CFDT partenaire des 48h de la pige les 16 et 17 juin à Nantes

    Depuis 2011, l’association Profession : Pigiste permet aux journalistes pigistes de toute la France de se retrouver, d’échanger et de partager leurs expériences lors d’une événement de deux jours dans une ville de France : les 48h de la pige. Cette année rendez-vous  les jeudi 16 et vendredi 17 juin à Nantes pour la 11e édition !  Le…

  • Barèmes de pige en presse spécialisée : ça ne décolle pas !

    Les négociations des barèmes minimum salariaux des journalistes de presse spécialisées ont abouti à une maigre revalorisation des tarifs de pige. La jugeant largement insuffisante, la CFDT-Journalistes (F3C-CFDT) est le seul des syndicats représentatifs à ne pas avoir signé. Les employeurs ont en effet refusé d’accéder à notre revendication d’un tarif au feuillet à 60 € brut (hors…

  • Grande commande photo : CFDT Journalistes interpelle le ministère de la Culture et la BNF

    Par courrier, CFDT-Journalistes a interpellé le ministère de la Culture et la BNF sur le deuxième volet de la Grande commande photo. En pleine crise sanitaire, le 27 août 2020, alors que de nombreux médias la subissaient de plein fouet, la ministre de la Culture d’alors, Roselyne Bachelot, et le ministre de l’Économie, Bruno Le…

  • Pigistes, formez-vous !

    Les pigistes ont trois possibilités pour se former : le plan de développement des compétences de leurs employeurs (plus facile à obtenir quand la collaboration est très régulière) le Compte personnel de formation (CPF) : il s’agit de formations visant une certification. Le CPF peut aussi servir à suivre un bilan de compétences. Tout commence…

  • Carte de presse : conseils aux pigistes

    Depuis les dernières élections à la Commission de la Carte d’Identité des Journalistes Professionnels (CCIJP), en décembre 2021, les représentants CFDT à la CCIJP sont : Yoann Labroux-Satabin, journaliste pigiste, élu CSE à La Vie (Malesherbes Publications), membre du comité de groupe Le Monde, occupe le siège de titulaire au sein du collège journalistes de…

Enable Notifications OK No thanks