Lutte contre la désinformation, concentration des médias ou encore liberté de la presse seront au cœur d’Etats généraux du droit à l’information sans doute à partir de novembre, a annoncé le 12 juillet la ministre de la Culture Rima Abdul Malak.
La CFDT-Journalistes et la F3C-CFDT expriment leur satisfaction de voir ainsi se profiler un rendez-vous majeur pour la profession et le secteur de la presse écrite et de la prese audiovisuelle, tant ils sont traversés par de graves sujets de préoccupation qui nécessitent un débat et une action résolus, où la CFDT compte jouer son rôle ferme et constructif.
L’accès du citoyen à « une information fiable, libre, pluraliste, indépendante » est l’un des grands chantiers du ministère, a assuré Rima Abdul Malak lors de son audition par la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale le 12 juillet. Dans cet objectif seront organisés des Etats généraux du droit à l’information, dès novembre, a-t-elle annoncé, rappelant qu’il s’agissait d’une promesse de campagne d’Emmanuel Macron, dont le programme mentionnait en effet « le lancement d’États généraux pour le droit à l’information, afin de lutter contre toutes les tentatives d’ingérence et donner aux journalistes le meilleur cadre pour remplir leur mission essentielle, en associant les citoyens. »
Les contours ne sont pas encore précisés mais pendant plusieurs mois sera menée une large consultation, y compris celle de citoyens et d’associations. Ces Etats généraux iront de l’éducation aux médias aux enjeux internationaux avec la « lutte contre les ingérences étrangères », en passant par « les enjeux de synergies dans l’audiovisuel public », « les enjeux de régulation » et les « dérives qui peuvent résulter des phénomènes de concentration dans les médias », ou encore les « enjeux de protection des journalistes, de la liberté de la presse » et d’expression.
La CFDT-Journalistes et la F3C-CFDT seront au rendez-vous, avec des positions claires et des propositions concrètes, dans la continuité de son travail revendicatif mené au quotidien.
Audiovisuel public, éducation aux médias
La CFDT-Journalistes et la F3C-CFDT sont engagées au premier rang de la bataille de la défense de l’audiovisuel public depuis que le gouvernement a confirmé la suppression de la redevance (138€), mettant à mal un financement pérenne et stable.
La CFDT-Journalistes soutient l’éducation aux médias comme axe prioritaire, comme elle l’a affirmé il y a peu comme cosignataire d’une lettre ouverte au Président de la République, lui demandant de déclarer ce sujet comme Grande cause nationale.
De nouvelles lois nécessaires
« Nous pourrons réfléchir ensemble aussi aux évolutions législatives qui pourraient résulter de ces débats », a indiqué la ministre.
Justement, la CFDT-Journalistes a exposé dès mars dernier, dans sa plateforme revendicative adressée aux candidats à la présidentielle, six évolutions législatives urgentes (de la création d’un statut pour les pigistes à l’étranger à l’entrée des représentants des salariés à la CPPAP pour mieux gérer les aides sà la presse). Elles comprennent comme axe important la lutte contre la précarité et le travail illégal des journalistes, axe dont les Etats généraux du droit à l’information ne pourront faire l’économie. Alors tout comme les Ministères de l’Education nationale et des Affaires étrangères sont prévus à la table, nous demandons aussi qu’y participe le Ministère du Travail.
La CFDT fer de lance sur la sécurité des journalistes
Enfin, la CFDT-Journalistes est déjà très mobilisée sur la protection des journalistes. Depuis le printemps 2021, elle travaille avec le député de Moselle Belkhir Belhaddad (LREM) à l’élaboration d’une proposition de loi visant à modifier le code pénal. Ce texte, déposé en décembre 2021, était soutenue par deux des principaux syndicats de la profession (CFDT-Journalistes et SNJ-CGT), représentant plus de la moitié des journalistes en France. Il n’avait pas trouvé sa place dans le calendrier législatif contraint avant la fin de la législature. Dans le contexte des Etats généraux à venir, Belkhir Belhaddad va redéposer sa proposition de loi (voir précisions ci-après).
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Mieux prendre en compte les violences volontaires à l’égard des journalistes
Actuellement, si un journaliste n’est pas grièvement blessé (si ce sont des violences volontaires avec une ITT inférieure ou égale à 8 jours) son agresseur ne risque qu’une amende courante (tribunal d’instance, pas tribunal judiciaire, 750€ maximum). Cela peut conduire à banaliser cette violence. Nous nous opposons à cette dérive délétère : parce que les journalistes ne sont pas des punching-balls, parce que la presse est un vecteur important de la démocratie, ensemble, protégeons les journalistes.
Le code pénal prévoit à l’article 222-12 des peines alourdies quand les violences sont commises sur un certain nombre de personnes : magistrat, avocat, gendarme, policier, agent de sécurité privé, pompier, gardien d’immeuble, enseignant, agent d’un exploitant de réseau de transport public de voyageurs, toute personne chargée d’une mission de service public, professionnel de santé, mais aussi prostituée, etc… L’agression devient alors immédiatement un délit quelle que soit la gravité des blessures et la plus petite peine encourue (celle sans ITT ou avec ITT<8 jours) passe alors à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. Les journalistes ne font pour l’heure pas partie de cette liste. Les faire entrer dans le cadre de ces professions « protégées » serait un alignement logique sur ce que la loi prévoit pour d’autres personnes reconnues comme ayant un rôle public dans notre société.
Aujourd’hui, en France, des journalistes sont brutalisés parce qu’ils enquêtent sur des sujets pour le bien commun ou lorsqu’ils sont en reportage au plus près des contestations sociales. Ne nous y trompons pas, le populisme marquera toujours des points là où la liberté d’informer reculera. S’en prendre physiquement à des journalistes qui vérifient leurs informations, rendent compte des manifestations dans le feu de l’action est dangereux pour toute la société. Nous sommes engagés de longue date dans ce combat, comme nous avons pu être partie civile dans un procès où ce sujet était central, et le resterons dans le cadre de ces Etats généraux et auprès de nos parlementaires.
Revoir l’audition de la ministre de la Culture où elle annonce ces Etats généraux du droit à l’information :
Ecouter à 0h23 mn et 2h29mn13s au sujet des Etats généraux du droit à l’information.