Les journalistes pigistes sont la richesse du Monde diplomatique : chaque mois, ils signent une grande partie des articles du journal, reportages et enquêtes d’une grande qualité.
Néanmoins, alors que Le Monde diplomatique réalise de jolis bénéfices (+2,6 millions d’euros en 2021) et possède des réserves financières conséquentes, les pigistes de ce journal sont faiblement rémunérés au regard du temps qu’ils consacrent à leurs enquêtes (plusieurs semaines, voire plusieurs mois par sujet). Ainsi, rapporté à leur temps de travail effectif, des journalistes du Monde diplomatique se retrouvent parfois rémunérés moins que le SMIC horaire. Ces travailleurs précaires n’ont pas accès aux œuvres sociales de l’entreprises, ni à l’intéressement (intéressement qui a représenté la somme de 488 565€ en 2021).
Le 4 avril 2023 auront lieu les élections au Comité social et économique du Monde diplomatique. Participer à la négociation du protocole d’accord préélectoral a permis à la CFDT, pour l’heure absente dans l’entreprise, de relever un problème majeur : la disproportion entre la place des journalistes rémunérés à la pige – très nombreux, et produisant une très grande partie du contenu – et la façon dont ils sont considérés.
Selon la direction du journal, le titre compte 31 salariés permanents et 115 pigistes. Pourtant, le 14 mars, date de dépôt des listes,aucun pigiste n’a pu se porter candidat. Il ne s’agit pas d’une interdiction, évidemment, mais d’une conséquence de critères d’éligibilité qui s’en tiennent aux dispositions légales. Si ces critères d’éligibilité (disposer de 9 fiches de paie sur les 12 derniers mois dont 2 dans les 4 derniers mois) ne font pas obstacle à la représentation des pigistes dans certaines entreprises, notamment celles qui les font travailler à une très grande régularité, ils nécessitent une adaptation mieux-disante dans des entreprises comme Le Monde diplomatique, où non seulement la parution est mensuelle, mais où la politique RH privilégie un large volant de pigistes ne signant qu’une ou deux fois par an, pour la plupart. Résultat : alors que les chantiers nécessaires pour mieux prendre en compte les pigistes nécessitent de les écouter, ils ne seront pas autour de la table du CSE. Par ailleurs, seule une poignée de pigistes auront le droit de vote.
La CFDT a tout fait pour assouplir ces conditions (électorat et éligibilité), en vain. Ailleurs dans la presse, la place des pigistes parmi les représentants du personnel ne fait plus débat. C’est non seulement une question de justice, une nécessité démocratique, et une chance pour l’entreprise : partout où ils sont élus, les pigistes apportent un regard neuf, pragmatique, et sont de véritables alliés des titres, tant ils y sont attachés et contribuent, par leur savoir-faire, à leur pertinence.
Le Monde Diplomatique ne serait pas Le Monde Diplomatique sans ses pigistes. Le Monde Diplomatique ne peut pas rester Le Monde Diplomatique s’il ne fait pas évoluer radicalement sa conception de la place des pigistes en son sein. Par conséquent, le mensuel doit s’inspirer de sa ligne éditoriale afin d’améliorer ses pratiques salariales.
Paris, le 20 mars 2023
Contacts : journalistes@f3c.cfdt.fr – snme@f3c.cfdt.fr
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