Communiqué SNJ (Solidaires) – SNJ-CGT – CFDT-Journalistes – SGJ-FO
La profession est toujours sous le choc. Des journalistes ont été délibérément pris pour cible, certains blessés avec plusieurs jours d’ITT, par des policiers de la Brav-M, le 8 juillet place de la République à Paris, alors qu’ils couvraient pour leurs médias le rassemblement en mémoire d’Adama Traoré, interdit par la préfecture de police de Paris quelques jours plus tôt.
Sur des images très nettes et sans équivoque, on voit la police s’en prendre délibérément aux journalistes.
Ce cas n’est pas anecdotique. Ces derniers mois, quand ils couvraient les manifestations contre la réforme des retraites ou les émeutes, de nombreux journalistes ont été empêchés de travailler par des forces de l’ordre déployées sur le terrain. Utilisation de flashs pour les éblouir, mise à distance, coups, interpellations avec mise en garde à vue, sous prétexte qu’on les confondrait avec des manifestants, et alors même qu’ils présentent leur carte de presse.
Au-delà des événements « sensibles », les journalistes sont aussi régulièrement écartés, brutalisés et poursuivis lors de reportages sur des actions militantes (intrusions d’activistes lors de réunions d’entreprises à Paris, action anti-OGM dans l’Aveyron en novembre 2021, installation illégale d’un cirque à Nice en mars 2023, etc.).
Dernièrement, à Marseille, une journaliste a été frappée par un CRS en pleine ville, lors d’un contrôle de routine, hors de tout événement, quand il a vu sa carte de presse.
A Besançon, un journaliste de Radio Bip/Media 25 a été condamné à une amende d’un euro symbolique pour « intrusion » sur une voie ferrée suite à une manifestation sur les voies des opposants à la réforme des retraites. Lors de l’audience, le procureur de la République a osé affirmer que la carte de presse internationale, délivrée par la FIJ, n’était pas reconnue en France alors que le Schéma national du maintien de l’ordre (SNMO) la mentionne expressément comme un moyen « d’attester de la qualité de journaliste ».
La liste des dérives commence à être trop longue pour estimer qu’il n’y a pas de problème.
Le SNJ, le SNJ-CGT, la CFDT-Journalistes et le SGJ-FO, organisations syndicales représentatives de journalistes, condamnent ces agissements de policiers en complète roue libre, qui musèlent la liberté d’informer et d’être informé. Aucun membre du gouvernement n’a condamné ces dérives, même pas le ministère de l’Intérieur. C’est inadmissible dans une démocratie digne de ce nom.
Dans son rapport rendu en mai 2021, la commission Delarue a formulé plusieurs préconisations destinées à améliorer les relations entre les journalistes et les forces de l’ordre. Les modifications du SNMO, que nous avons obtenues en décembre 2021, allaient dans le bon sens, rappelant très clairement que les forces de l’ordre sont là pour protéger les journalistes et que leur présence est nécessaire.
La création d’un groupe de contact entre les organisations de journalistes, médias et les services communication du ministère de l’Intérieur, de la gendarmerie, de la police, de la préfecture de police de Paris devait permettre des échanges entre professions. Ce groupe de contact se réunit régulièrement depuis un an.
Les organisations syndicales représentatives de journalistes font régulièrement remonter des atteintes des forces de l’ordre contre des journalistes lors des réunions mensuelles du groupe de contact. Des journalistes ont également suivi des immersions sur le terrain auprès de forces de l’ordre, pour leur rappeler le rôle d’observateur du journaliste dans toute démocratie. Malheureusement sur le terrain, les directives ne redescendent pas : la Brav- M et d’autres corps de police, comme pendant les manifestations contre la réforme des retraites, continuent à viser expressément des journalistes.
Le SNJ, le SNJ-CGT, la CFDT-Journalistes et le SGJ-FO somment le ministre de l’Intérieur de protéger les journalises qui exercent leur mission d’informer au quotidien. Certains membres de la Brav-M et d’autres corps de police deviennent incontrôlables.
Le SNJ, le SNJ-CGT, la CFDT-Journalistes et le SGJ-FO estiment que le groupe de contact ne peut se résumer à un simple listing mensuel des journalistes pris pour cible par des forces de l’ordre, ne donnant souvent lieu à aucun retour sur les suites données. Nos organisations attendent un véritable changement sur le terrain, sinon, pour celles qui y siègent encore, elles quitteront le groupe de contact.
Paris, le 21 juillet 2023.