Diffamation, injure : les élus se votent un rallongement du délai de prescription !

Communiqué intersyndical SNJ, SNJ-CGT, CFDT-Journalistes, SGJ-FO

Rallongement de la prescription du droit de la presse : c’est encore une fois la liberté d’informer qu’on bâillonne !

Les parlementaires ont décidément de plus en plus de mal avec la liberté d’expression. A l’occasion du débat au Sénat sur la proposition de loi renforçant la sécurité des élus locaux, un amendement déposé conjointement par la sénatrice LR Catherine Di Folco et le groupe socialiste modifie la loi de 1881 sur la presse. L’article 2 bis de cette proposition prévoit que pour les délits de diffamation ou d’injure publique contre un élu ou une personne dépositaire de l’autorité publique, le délai de prescription sera porté de trois mois à un an, faisant une loi d’exception pour les seuls élus.

Ce texte a été débattu ce mercredi 7 février à l’Assemblée nationale, en 10 minutes, révèle le journal d’informations Mediapart. Si la députée Renaissance Violette Spillebout l’a limité aux seuls élus, locaux ou nationaux, et aux candidats à un tel mandat, la proposition enfonce un coin sans précédent dans le fragile équilibre de la loi de 1881.

La loi de 1881 sur la liberté de la presse en France fait figure de modèle, jusqu’à la Cour européenne des droits de l’Homme pour la défense de la liberté d’expression.

Le SNJ, le SNJ-CGT, la CFDT-Journalistes et le SGJ-FO, organisations syndicales représentatives de journalistes en France, condamnent avec la plus grande fermeté cette modification d’une des lois les plus protectrices de la liberté d’expression, de la liberté d’informer et d’être informé.

Ce rallongement du délai de prescription mettrait une épée de Damoclès sur le traitement de l’actualité politique avec le risque de voir, durant un an, un élu ou un candidat s’en prendre à un ou une journaliste ou à un éditeur de presse si la suite de son mandat venait à subir les conséquences d’informations délivrée par un organe de presse.
C’est aussi une pression financière supplémentaire mise sur les éditeurs, journalistes et organisations de défense de la profession avec un risque d’inflation des procédures et de leur coût.

C’est un coup porté contre la démocratie dans son ensemble. Les journalistes auraient le droit d’enquêter et de faire leur travail d’investigation, sauf à s’intéresser de trop près aux affaires politiques de ce pays. On marche sur la tête!

La liberté d’expression ne peut se négocier. Si les éditeurs de presse et les journalistes, depuis plus d’un siècle, peuvent avoir à rendre des comptes devant les tribunaux, du poids de leurs écrits, il n’est pas question qu’une catégorie de citoyens, qui par

ailleurs sont aux manettes du pouvoir législatif, puisse exercer une pression intolérable sur la liberté d’informer des rédactions.

Alors que les Etats généraux de l’information sont en cours et que les propositions citoyennes font état d’une demande de transparence, cette proposition des députés nous apparaît comme un camouflet au libre exercice du journalisme.

L’intersyndicale des journalistes s’oppose catégoriquement à cette modification de la loi de 1881 et demande le retrait immédiat de cet article 2b de cette proposition de loi. Contactée, Violette Spillebout, députée Renaissance et rapporteure,s’est dit “ouverte à une table-ronde rapide” avant la commission mixte paritaire prévue fin février.

L’intersyndicale déposera une question prioritaire de constitutionnalité si cette proposition de loi est adoptée en l’état.

Paris, le 7 février 2024.

Les actualités

  • Contre « la saignée », une grève très suivie à La Provence

    Un choc. Une saignée. Les salariés de La Provence sont abasourdis par l’annonce de 61 suppressions de postes au sein du quotidien régional marseillais, dont 30 journalistes et constatent, amers, que les promesses de l’actionnaire Saadé / CMA CGM n’ont vraiment pas tenu longtemps ! Réunis en assemblée générale, 88% des 192 salariés ayant participé…

  • Ebra. Utilisation de ChatGPT à L’Est-Républicain : la CFDT ne veut pas être « spectatrice » sur le sujet

    Dans une lettre envoyée au président directeur général d’Ebra, Philippe Carli, les élus CFDT des journaux du groupe demandent la création d’un observatoire auquel les représentants des organisations qui le souhaitent pourraient participer. « Le groupe EBRA est en passe de lancer une expérimentation d’utilisation de l’intelligence artificielle à la rédaction de l’Est Républicain. Si la…

  • France Télévisions : les éditions d’Ici en grève

    Mise à jour Conflit à France 3 et FTR : les élus quittent la séance ! Ce jeudi 23 novembre, après lecture de la déclaration des élus, la Présidente de France Télévisions a voulu dérouler sa présentation de situation générale en accordant « deux secondes » (sic) au conflit en cours à France 3 et…

  • Marylise Léon rencontre les journalistes CFDT

    « Etre journaliste, ça se défend ». Le message des journaliste-CFDT est bien passé auprès de Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT qui, le 6 novembre, a participé à une rencontre avec les adhérents journaliste de la Fédération Culture, Conseil et Communication (F3C) à l’immeuble des Fédérations, avenue Simon-Bolivar à Paris. Une rencontre « au top »…

  • Nouveau numéro de Profession journaliste, l’IA à la une

    CFDT-Journalistes vient de publier un nouveau numéro de son magazine Profession journaliste. Au sommaire, un dossier sur l’intelligence artificielle, les Etats généraux de l’Information, le secret des sources atteint avec la perquisition d’Ariane Lavrilleux, nos revendications pour les photojournalistes et pour les correspondants à l’étranger, le point sur les négos de branche… Vous pouvez le…

Enable Notifications OK No thanks