Dans un communiqué commun à CFDT Cadres et CFDT Journalistes diffusé ce mercredi 6 mars 2024, il est rappelé l’impérieuse nécessité d’avoir un encadrement de l’utilisation de l’intelligence artificielle dans les rédactions.
Les nouvelles technologies liées à l’intelligence artificielle (IA) gagnent du terrain dans les métiers de l’information. Les capacités des logiciels d’IA se développent à une vitesse exponentielle. Face à une IA vouée à devenir omniprésente dans les médias, les journalistes CFDT exigent que l’IA reste un outil au service des rédactions et s’opposent à ce qu’elle devienne une force de travail qui coûterait moins cher que les journalistes eux-mêmes, photographes, cadreurs, graphistes, traducteurs… Pour les journalistes, il est urgent de poser un cadre et des limites à cet outil en constante évolution, qui va impacter les métiers de l’information et sans aucun doute ébranler la confiance du public dans leur crédibilité.
Les journalistes CFDT ont élaboré un plan de travail, qu’ils ont présenté aux Etats Généraux de l’information le 30 novembre dernier, et qu’ils mettent régulièrement en avant auprès des employeurs.
Ethique :
• Ne pas utiliser de matériel IA qu’un journaliste n’a pas vérifié et considéré, après examen attentif, comme pouvant être utilisé.
• Négocier dans chaque entreprise de presse un accord qui cadre l’usage de l’IA et la mise en place d’un comité paritaire de suivi impliquant les représentants syndicaux, dans lequel des bilans chiffrés de l’utilisation de l’IA doivent être présentés et des décisions de réversibilité doivent pouvoir être prises.
• Systématiquement mentionner au public, et de manière non équivoque, qu’un contenu a été généré avec de l’IA.
• Réclamer que les pouvoirs publics/les entreprises n’utilisent pas l’IA à des fins de propagande, au risque de brouiller la frontière entre informations et publicité, voire produire des fake news.
• Clarifier la responsabilité éditoriale pour les contenus générés par une IA. Même pour un « contenu IA », le directeur de la publication doit rester responsable. En effet, en droit de la presse, le délit n’est pas l’écriture de l’article mais bien la publication de celui-ci.
Conditions de travail :
• L’IA, comme outil, ne doit pas se traduire par des réductions de postes dans les rédactions. Le temps de travail potentiellement gagné doit être mis au profit de l’enquête, du reportage, du débat au sein d’une rédaction, et de la baisse des surcharges de travail, et non limiter les postes.
• Systématiquement valoriser le terrain : privilégier une photo, un reportage sur place plutôt qu’une synthèse opérée par l’IA.
• Des formations doivent être proposées aux utilisateurs de l’IA en vue d’éviter des dérives.
• Derrière chaque contenu généré par l’IA, la CFDT réclame une révision professionnelle avant publication, qu’il s’agisse de texte, de sons ou d’images : relecture et correction par un journaliste, par un traducteur professionnel, par un ingénieur du son ou un graphiste…
• Négocier à l’échelle européenne une législation sur l’usage des IA en concertation avec tous les créateurs : journalistes, auteurs, musiciens, photographes, vidéastes…
Droits d’auteurs, droits voisins, droit d’opposition :
• Obtenir une juste rémunération des auteurs d’œuvres qui contribuent à de nouveaux contenus générés par l’IA.
• Elaborer une taxe européenne sur les machines pour compenser leur travail « gratis ».
• Elaborer des droits voisins sur les productions IA, à l’instar de ce qui a été validé pour les « productions humaines » avec une clé de répartition sur la part appropriée et équitable due aux journalistes et autres auteurs « ponctionnés » par les IA.
• Interdire aux IA de scanner des contenus sans autorisation de leurs auteurs.
• Mettre en place un droit d’opposition des détenteurs de droits sur les données soumises au droit d’auteur, utilisées par les IA.