(Communiqué intersyndical)
Les négociations portant sur les droits voisins viennent de se conclure au “Monde”, ce vendredi 7 juin 2024. Après plus de deux ans de discussions et plus d’une vingtaine de réunions avec la direction, nous signons un premier accord satisfaisant car en pourcentage, sans plafond et à un niveau de redistribution encore inégalé: 25%. Le reste étant investi dans le journal, afin que l’ensemble des catégories professionnelles en bénéficient, notamment en termes de rémunération. L’accord signé prend en compte les contrats passés entre Google, Facebook, Microsoft, OpenAI et Le Monde pour la période allant d’octobre 2019 à fin 2024.
Les négociations ont été longues et difficiles. Lors des premières discussions, la direction nous proposait un forfait – l’AFP venait de signer un accord de ce type. Elle ne voulait pas entendre parler de pourcentage, qui était à nos yeux la seule expression possible d’une “part” des droits voisins que la loi prévoit de redistribuer aux journalistes.
Un contrat avec Open AI
Après plus d’un an de négociation, la direction cède enfin sur le pourcentage début 2023, mais veut imposer un plafond. Nous avons pris le temps nécessaire pour négocier et obtenir, début 2024, que la direction cède sur le plafond et accepte un niveau de redistribution nettement supérieur à ce qui a été négocié dans d’autres publications. Enfin une part “appropriée et équitable”. Il ne restait plus qu’à valider l’assiette, à savoir les sommes concernées par les droits voisins.
En effet, l’arrivée du contrat OpenAI en mars 2024 et donc de l’intelligence artificielle a introduit une nouvelle donne dans les négociations sur un sujet que personne ne maîtrise vraiment. Les organisations syndicales ont travaillé avec expert comptable et avocat afin de réduire au maximum la part de risques.
Afin de trouver un accord susceptible de satisfaire le plus grand nombre, nous avons fait un travail collectif en partageant nos réflexions avec les militants et les centrales syndicales. Une nouvelle fois, notre détermination et la solidarité que nous avons su maintenir entre syndicats nous a permis d’obtenir un bon accord qui pourra nous l’espérons servir d’exemple pour la profession. Nous souhaitons que cette nouvelle manne pour le groupe et la SEM, puisse bénéficier, notamment par le recrutement, à l’ensemble des catégories professionnelles. Un accord salué comme une victoire par l’ensemble des syndicats signataires.
Dans les coulisses de l’accord, avec Anne Rodier
La déléguée syndicale CFDT du Monde Anne Rodier a été une importante cheville ouvrière de la négociation de cet accord historique, et a véritablement porté son aboutissement. Il faut une sacrée dose de persévérance, de pugnacité, de sens des priorités, de capacité à consulter et entendre, pour tenir durant les 3 années de cette négo. Une course de fond où elle a obtenu, avec les autres organisations syndicales, des victoires d’étape. Déjà, l’assurance d’un paiement au pourcentage et non au forfait, avec un pourcentage inédit au national, fixé à 25%. Puis, l’assurance que ce pourcentage ne serait assorti d’aucun plafond, contrairement à ce que voulait la direction, et qui aurait considérablement amoindri la portée du pourcentage.
Pour franchir ces étapes, il a parfois fallu apprendre à ralentir, et réfréner son impatience, notamment pour attendre des décisions attendues de la part de la CDADV, l’instance paritaire nationale, sous l’égide du ministère de la Culture, qui tranche les litiges sur ces accords. « Deux décisions de cette commission, concernant EBRA en janvier 2023 et concernant 20 minutes en janvier 2024, ont donné du poids à nos arguments présentés au Monde. En prenant le temps nous avons aussi bénéficié de la bonne conjoncture financière avec le contrat signé en mars avec OpenAI. »
Pour Anne Rodier, deux facteurs ont été essentiels. D’abord, un bon dialogue avec la CFDT et ses experts au plan national, pour bien définir la stratégie. Puis, un bon dialogue avec les adhérents notamment pour le rythme de la négo : « j’ai régulièrement demandé aux adhérents leur avis. C’était capital pour m’aiguiller sur le moment qui fut le bon. Et dans cet exercice difficile qu’est la négo, les adhérents sont d’un soutien capital, ils m’ont beaucoup enrichie, y compris dans le débat, avec des angles de vue très précieux ! »
Chapeau, et merci Anne, car cet accord va bien aider les suivants !