Les derniers rebondissements, dans le dossier de reprise du quotidien régional qui compte avec l’ensemble de ses filiales, 850 salariés, nous renforcent dans nos craintes, pour l’indépendance éditoriale du titre et la pérennité de notre activité, notamment industrielle.
Depuis six mois la CFDT se bat pour que la seule offre émanant d’un groupe de presse, de surcroît déjà détenteur de 11 % du capital de l’entreprise, ne soit pas écartée.
Depuis six mois tout est fait que pour CMA CGM l’emporte.
Certes, une majorité d’élus du personnel ont émis un avis favorable, quoique teinté de nombreuses réserves, à cette offre. Pas la CFDT ni ses alliés. Ni les salariés eux-mêmes, dont bon nombre regrettent de ne pas avoir été directement consultés sur les deux offres.
La CFDT craint pour l’indépendance éditoriale du journal quand elle voit l’appel des organisations patronales du territoire à soutenir CMA CGM.
La CFDT craint pour la pérennité de l’imprimerie que le transporteur maritime, en l’occurrence totalement inexpérimenté en matière de presse, prévoit d’installer à Marseille, alors que NJJ avait le projet, depuis 2019 déjà, de construire une imprimerie commune à La Provence et Nice Matin, laquelle s’assurerait des volumes conséquents.
La CFDT s’interroge, lorsqu’elle apprend que l’ancien ministre des Transports devait intégrer le management de CMA CGM, s’il n’avait pas été retoqué par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, tant ce pantouflage pose question sur les liens entre le monde politique et cet investisseur potentiel.
La CFDT s’interroge aussi, quand elle voit le «passage en force», de CMA CGM et du liquidateur, aux intérêts conjoints, pour faire agréer l’offre de l’armateur par le conseil d’administration de La Provence.
La CFDT, qui sait être un syndicat offensif dans les filiales de Xavier Niel, notamment de téléphonie, pour défendre les droits des salariés, comprend qu’il engage aujourd’hui des recours contre la décision du conseil d’administration de La Provence d’agréer l’offre de CMA CGM tant les circonstances dans lesquelles cet agrément a été obtenu suscitent de questions auprès des juristes que nous avons consultés.
Si ce dossier dure depuis trop longtemps, la CFDT ne cédera pas au chantage au dépôt de bilan.
Avoir besoin d’un nouvel élan, ce n’est pas forcément se précipiter dans les bras d’un repreneur qui a su convaincre, en annonçant des investissements (réalisés en partie avec l’argent dont La Provence dispose sur ses comptes), en promettant la pérennité des emplois ou en prévoyant de la croissance.
Si la majorité des représentants du personnel a émis un avis favorable sur cette offre tout en émettant de nombreuses réserves étayées par le rapport du cabinet Sécafi, il n’en demeure pas moins que de très nombreux salariés sont intéressés par la perspective d’intégrer un groupe de presse, déjà détenteur d’une stratégie de développement et qui jusqu’ici n’a rien à se reprocher en ce qui concerne le respect des lignes éditoriales de ses titres.
Non, La Provence, qui vient de vendre son siège social, n’est pas au bord du dépôt de bilan.
La CFDT a d’ailleurs demandé à sa direction de continuer à investir, en utilisant la trésorerie constituée par la vente du siège social, notamment dans un nouvel outil informatique. Mais n’a pas été entendue.
Au sein du journal, tous les salariés sont au travail, à leur tâche, nous avons des équipes compétentes qui peuvent faire des choix d’investissement et l’actionnaire minoritaire peut être sollicité pour les soutenir. Il n’y a donc pas urgence, comme veulent le faire croire les défenseurs de l’offre de CMA CGM.
Les défenseurs de l’entreprise, et de ses 850 salariés, dont la CFDT fait partie, eux, veulent que le choix du repreneur se fasse sur des critères de pérennité et d’indépendance de l’activité.
Jusqu’à présent les liquidateurs en charge du dossier ont eu tout loisir d’engager des procédures pour permettre à l’offre de CMA CGM d’être agréée. Maintenant, l’autre repreneur, seul groupe de presse à s’être positionné, doit pouvoir bénéficier des mêmes droits.