CDD multi-remplacements : l’expérimentation qui aggrave la précarité des journalistes

Un décret paru le 13 avril 2023 réactive « l’expérimentation » des « CDD multi-remplacements ». Jusqu’au 14 avril 2025, 66 secteurs d’activité vont pouvoir conclure ce type de contrat, contre 11 lors d’une précédente expérimentation.
Parmi les secteurs d’activité concernés (filières où l’on utilise déjà beaucoup de contrats courts, ou celles où il existe des postes dits « en tension », difficiles et aux salaires bas), il y a désormais celui couvert par notre convention collective des journalistes.

Le principe : une entreprise peut conclure un CDD ou un contrat de travail
temporaire avec un salarié qui pourra ainsi remplacer plusieurs salariés à la suite.
Cette expérimentation rompt donc avec les règles qui prévalaient en matière de recrutement d’un CDD, à savoir : 

  • être embauché pour un motif précis et pour un temps bien défini (remplacement pour maladie, maternité, surcroît d’activité….) et à défaut, le contrat de travail à durée déterminée conclu à cet effet doit être requalifié en CDI, 
  • conclure autant de contrats CDD qu’il y a de personnes à remplacer, 
  • verser une prime de précarité (10% du salaire brut perçu pendant le CDD), même si la personne enchaîne un autre CDD après un délai de carence.


Il s’agit donc d’expérimenter, pour une durée de deux ans, le CDD multi-remplacements dans nos rédactions… là où la précarité s’est déjà largement développée au fil des ans, et où tous les procédés sont bons pour éviter d’embaucher des journalistes en CDI et pour rogner sur les piges.

On imagine les conséquences sur la santé de collègues amenés à passer d’un poste à l’autre, sans interruption ; on imagine aussi les conséquences sur les conditions de travail au sein des rédactions soumises à ce régime.

Cette « expérimentation » est en revanche pain béni pour les employeurs, qui auront encore moins de raisons d’embaucher de façon pérenne sur les postes vacants et ne devront plus payer la prime de précarité !

Nous —  SNJ, SNJ-CGT, CFDT-Journalistes, SGJ-FO —  organisations syndicales représentatives des journalistes, exprimons notre rejet de ce nouveau recul social, et notre attachement au CDI, qui est, rappelons-le, la forme normale et générale de relation de travail.


L’intersyndicale journalistes invite les sections de nos syndicats à être vigilantes sur l’utilisation qui pourrait être faite de ce nouveau cadeau aux employeurs dans leur entreprise, à dénoncer tout abus et à réclamer que le CDI soit la norme, comme le prévoit le droit du travail.

Paris, le 8 juin 2023

Les actualités

  • Licenciement d’un journaliste au Démocrate de Vernon : les élus claquent la porte du CSE

    Ils ont unanimement quitté la séance. Suite au licenciement d’un jeune journaliste au Démocrate de Vernon, les élus du CSE CFDT, CGT et SNJ de Publihebdos (filiale des hebdomadaires du groupe Ouest-France) trouvent la sanction disproportionnée et demandent la réintégration du confrère. Ils seront mardi 1er mars 2022 en fin de matinée à Vernon et…

  • Reporters d’Envoyé Spécial agressés : le propriétaire terrien condamné, une victoire pour la profession

    Communiqué CFDT-Journalistes et SNJ-CGT du 23/02/2022   Reporters d’Envoyé Spécial agressés: le propriétaire terrien condamné, une victoire pour la profession   Le tribunal de police de Tarascon a condamné en première instance lundi 21 février 2022 Didier Cornille, patron influent du secteur agricole, poursuivi pour l’agression de journalistes de France 2 (Envoyé Spécial) qui enquêtaient sur…

  • Droits voisins : les journalistes ne doivent pas être les dindons de la farce

    Deux ans après transposition dans la loi de la directive européenne instaurant un droit voisin pour la rémunération des entreprises de presse par les plates-formes internet pour la reprise de leurs contenus, les géants du numérique traînent encore des pieds. C’est ce qu’il ressort d’un colloque organisé lundi 14 février 2022 à l’Assemblée nationale, à…

  • Adoption de la loi Alerte : une victoire collective décisive

    Le Parlement a adopté mercredi 16 février une proposition de loi visant à mieux protéger les lanceurs d’alertes. Le texte a fait l’objet d’un ultime vote favorable, bouclant trois mois de parcours législatif et une mobilisation des ONG et des syndicats, dont la CFDT-Journalistes, depuis deux ans. La France est le 8ème pays (sur 26…)…

  • Appel STOP BOLLORE : Pour une information libre !

    La CFDT-Journalistes est signataire de l’appel « Stop Bolloré : Pour une information libre ».   Presse écrite, radios, chaînes de télévision, maisons d’édition de livres, agences de communication, jeux vidéo, instituts de sondage, salles de spectacle… en quelques années, Vincent Bolloré a constitué un empire médiatique tentaculaire au service de ses ambitions idéologiques réactionnaires. Rien que…

Enable Notifications OK No thanks