Droit voisin : les représentants des journalistes et auteurs non journalistes en appellent au respect de la loi

Il y a 5 ans, la directive européenne DAMUN du 17 avril 2019 instituait un droit voisin au bénéfice des éditeurs de presse devant leur permettre d’obtenir une rémunération pour la réutilisation de leurs publications par les services de communication au public en ligne. Dans ce cadre, le législateur européen a explicitement prévu qu’une part de cette rémunération versée par les plateformes de l’internet aux éditeurs de presse, revienne aux journalistes et autres auteurs contribuant au contenu des publications de presse. 

Depuis, une dizaine de contrats ont été conclus entre une partie de la presse française et des géants du numérique comme Google et Facebook. Ces accords, obtenus après de longues négociations au cours desquelles les éditeurs ont souvent critiqué le comportement et le manque de transparence des plateformes, ont permis à la presse de percevoir une nouvelle catégorie de revenus.

Toutefois, les journalistes et autres auteurs qui créent le contenu des publications de presse, ne reçoivent toujours pas la part qui leur est due.

L’heure est donc plus que jamais aux négociations, loyales et de bonne foi, entre les éditeurs et les auteurs (journalistes et non journalistes) afin de déterminer la part de cette nouvelle redevance qui revient à chacun, que le législateur a voulu « appropriée et équitable » pour les auteurs.

Ces négociations sont très difficiles et ont du mal à aboutir. Nombre d’éditeurs semblent très réticents à assurer un partage équitable des revenus, cherchant à imposer un forfait minimaliste, évitant de donner des éléments clairs aux négociateurs, alors même qu’ils avaient dénoncé le refus des plateformes d’accepter le partage de valeur que procure la mise en ligne d’articles de presse.

Nous avons participé à la lutte qui a permis d’obtenir ce nouveau droit au Parlement européen et salué la création de la loi qui l’instaurait. Mais six ans plus tard il est évident qu’elle ne permet pas en l’état d’atteindre son but. Les éditeurs s’étaient engagés à partager les sommes dès qu’ils les auraient touchés, ils sont trop nombreux à n’avoir pas tenu parole.

Ces raisons nous incitent à saluer la proposition de loi du député Laurent Esquenet-Goxes visant à garantir l’effectivité des droits voisins de la presse. Nous encourageons aussi à ce qu’elle soit complétée par des obligations symétriques de transparence des éditeurs et agences de presse à l’égard des auteurs. Cette transparence doit être due dès la négociation et pas seulement a posteriori, en reddition de comptes, et doit être assortie de sanctions en cas de non-respect.

A défaut d’obtenir des accords satisfaisants dans le cadre légal actuel, la loi devrait aussi être améliorée :

  • en déterminant un taux de partage auteurs/éditeurs comme ceci existe par exemple en matière de licence légale radiophoniques entre artistes de la musique et producteurs phonographiques, en l’occurrence 50/50.
  • et en prévoyant des garde-fous afin d’empêcher la diminution artificielle de l’assiette de rétrocession du droit voisin dans les accords conclus entre les éditeurs et les plateformes de l’internet.

Pour une bonne poursuite des négociations, un encadrement législatif strict est nécessaire. Les incertitudes économiques, les dangers qui pèsent sur l’information et les nouveaux enjeux liés à l’intelligence artificielle imposent de réagir vite.

Il n’est pas concevable que les auteurs ne bénéficient pas d’une partie juste et équitable de la richesse quils ont créée, c’est de la justice élémentaire !

Les actualités

  • Coronavirus – Télétravail, précaires : les journalistes doivent être protégés

    La CFDT Journalistes et la F3C CFDT demandent à toutes les entreprises de presse d’édicter des consignes claires et équitables sur les conditions de reportage, en accord avec les autorités de santé de généraliser le télétravail en fournissant si besoin des ordinateurs portables de déclarer en arrêt maladie exceptionnel (décret du 31 janvier) et pour toute la durée de fermeture…

  • Coronavirus : le défi de la continuité de l’information

    Alors que la France se met à l’arrêt en raison de l’épidémie de Coronavirus, le travail des journalistes demeure indispensable pour traverser cette crise. La majeure partie de la population est désormais confinée sans les contacts habituels de sa vie sociale. Dans ce contexte extraordinaire et difficile pour la population, la F3C CFDT (Fédération communication…

  • Avec CFDT-Journalistes, pigistes, faire appliquer nos droits !

    Beaucoup de journaux et d’agences de presse n’appliquent pas pour leurs pigistes la loi, la convention collective, les barèmes. Et pas seulement des petites entreprises. Isolé, le pigiste ne peut pas grand chose – sauf dans de très rares cas. Mais pour l’immense majorité des pigistes, la solution du problème passe par l’action collective et…

  • Analyse. La précarisation du métier de journaliste a des conséquences sociales

    La précarisation du métier de journaliste que les organisations syndicales constatent depuis quelques années n’est pas sans avoir des conséquences sociales. Des chiffres pour commencer. Statut précaire rime avec jeune, femme, et (beaucoup) plus petit salaire. Chez les journalistes de moins de 26 ans, plus de 2 sur 3 (67,9%) sont pigistes ou en CDD en…

Enable Notifications OK No thanks