Comment les élus CFDT à la CCIJP ont travaillé pour améliorer l’accès à la carte de presse pour les pigistes correspondants à l’étranger ? On vous raconte !
En reportage à l’étranger, la carte de presse est capitale. Pouvoir justifier que l’on est journaliste est important, surtout quand les conditions de sécurité sont fragiles.
Or, et nous le déplorons, certains pigistes corres à l’étranger ne perçoivent pas de fiches de paie de leurs employeurs français, ce qui ne compte pas dans la part presse de la carte. Ils doivent facturer ou être salariés de prestataires. C’est le cas notamment à France24 (d’autres délivrent une fiche de paie mais sans les cotisations afférentes, ce qui est un sujet encore différent), qui trouve prétexte dans les règles internationales de Sécurité Sociale
Ce dossier très problématique est depuis longtemps identifié par CFDT-Journalistes.
Déjà dans sa grande enquête de 2019 sur les correspondants à l’étranger, 35% des 135 répondants n’avaient pas la carte de presse.
Pour la CFDT, il fallait trouver un moyen de limiter la double peine subie par les pigistes. La CFDT a demandé et obtenu un assouplissement des règles à la CCIJP.
Dérogation au salariat dans des cas très encadrés
À la CCIJP, nos élus ont participé à l’ouverture d’un groupe de travail dédié et mené un gros travail d’analyse et de proposition.
Ils ont commencé par un sondage auprès des intéressés.
Puis ils ont mené bataille contre le statu quo.
La CFDT a plaidé pour une prise en compte des revenus en facture ou salariat indirect dans le cas précis des corres à l’étranger, tant que le code de la Sécu n’a pas changé, et évidemment sans extension aux pigistes en France où le salariat reste obligatoire. #LoiCressard
Désormais, à titre expérimental et malgré les fortes réticences SNJ, la CCIJP accorde aux corres à l’étranger (et à eux seuls) la carte hors salariat ou dans le cadre d’un salariat indirect. Chaque dossier est étudié au cas par cas : ils fournissent justifs de rémunération, de production, de lien de subordination.
Dans cette expérimentation, les revenus issus d’entreprises de droit local ne sont pas pris en compte, sauf quand elles sont bien identifiées comme les bureaux locaux de médias français.
Ceci ne vaut pas caution de pratiques qui pourraient être évitées !
La CFDT encourage tous les pigistes pour qui l’obtention de la carte de presse CCIJP était jusque là complexe, à réitérer leur demande au vu de ces nouvelles règles expérimentales. Les élus CFDT à la CCIJP peuvent les conseiller finement.
Envoi de courriers aux employeurs
Ces règles s’assortissent d’une autre mesure forte : toute attribution de carte dans ces conditions dérogatoires (salariat indirect, facture) fait l’objet d’un courrier adressé à l’employeur ou au donneur d’ordre en France, en vue de l’inciter à trouver des solutions permettant le salariat.
La CFDT est lucide : cette mesure ne règle pas toutes les situations. Mais elle peut aider certains corres à l’étranger, et les aider à faire leur travail est notre priorité.
Nous savons par exemple que les pigistes corres à l’étranger de médias français travaillent souvent aussi pour des médias non français, qui ne comptent pas dans la part presse de la CCIJP. Bon à savoir : ces revenus peuvent être neutralisés (pour ne pas plomber le hors presse).
En attendant une modification du Code de la Sécurité sociale
Si cette mesure est expérimentale, c’est en attendant que la loi change et facilite la reconnaissance de tous les corres à l’étranger comme salariés de leurs employeurs français. Il faut permettre les cotisations en France. C notre autre combat !
Depuis 5 ans, la CFDT milite pour que le code de la Sécurité sociale permette aux journalistes pigistes corres à l’étranger de médias français de cotiser en France. Ils ont droit à une vraie protection sociale et un plein salariat !
En octobre 2023 nous avons défendu notre vision très précise (modification du code de la Sécurité sociale) auprès de la sénatrice EELV Mélanie Vogel, qui a déposé une proposition de loi en ce sens (nous écouter à 1h43)
Nous sommes heureux que le groupe de travail 3 des États généraux de l’information ait retenu notre proposition de modification du code de la Sécurité sociale pour les correspondants à l’étranger et demandons à Rachida Dati et Geneviève Darrieussecq de passer aux actes.
La carte FIJ, un complément de ce travail à la CCIJP
De façon complémentaire, toute l’année, la CFDT permet à ses adhérents journalistes d’obtenir la carte de presse internationale délivrée par la Fédération internationale des journalistes (FIJ).
Toutes les conditions d’obtention et le dossier de demande sont à retrouver ici.
William Minh Hao Nguyen, correspondant en RD Congo, et candidat sur la liste CFDT aux élections CCIJP, témoigne de l’utilité des deux cartes : la carte de presse française (CCIJP) et la carte de presse internationale (FIJ)
« Avant de devenir correspondant à l’étranger, la carte de presse n’avait pour moi aucune utilité quotidienne, excepté les rares fois où je la montrais à un proche curieux.
En RD Congo où les conditions de travail de la presse sont précaires, justifier de son statut de journaliste grâce à un document officiel, que ce soit auprès des autorités locales ou bien d’autres interlocuteurs, permet le plus souvent de s’assurer leur collaboration ou a minima d’éviter les ennuis. À défaut de me connaître personnellement, la carte de presse est aux yeux de beaucoup de gens un gage de sérieux et de professionnalisme qui me permet d’engager la conversation dans une posture favorable.
Dans un pays où le sentiment anti-français progresse, selon à qui je m’adresse je jongle entre la carte de presse française et celle de la FIJ si je pense qu’il est préférable de taire ma nationalité mais qu’il me faut tout de même obtenir des éléments pour accomplir mon travail. Auparavant simple décorum, je ne pourrais plus me passer de mes deux cartes de presse dans mon travail. »