Censure: la CFDT-journalistes solidaire de Médiapart, victime d’une procédure-bâillon

Le tribunal judiciaire de Paris interdit à Médiapart, « sous astreinte de 10 000 euros par extrait publié », de publier la suite de son enquête sur le maire de Saint-Etienne, Gaël Perdriau.Fin août 2022, le site d’information et d’investigation en ligne avait révélé un chantage à la sextape contre le premier adjoint au maire

Ce dernier, le centriste Gilles Artigues, ancien député, avait été fil à son insu avec un homme lors d’une soirée intime, à l’hiver 2014, à Paris. À la suite des articles de nos confrères, une enquête préliminaire avait été ouverte par le parquet de Lyon et est toujours en cours et l’affaire avait provoqué des conséquences en cascade (démissions, licenciements) à Saint-Etienne. 

Alors que le journal en ligne s’apprêtait à prolonger ses révélations, le tribunal judiciaire de Paris, saisi par l’avocat du maire, a censuré les suites de l’enquête de Mediapart« sans même avertir le site d’information de la demande à son encontre ni a fortiori entendre ses arguments », comme l’explique Médiapart aujourd’hui sur son site, piétinant les règles qui protègent la presse (loi du 29 juillet 1881) et, plus largement, nos libertés démocratiques fondamentales. Parmi celles-ci, l’accès à une information libre. Selon l’association des avocats experts du droit de la presse, « de mémoire judiciaire, jamais une interdiction préventive d’une publication de presse (…) n’avait été prononcée par un magistrat ». 

Il s’agit là d’une atteinte intolérable aux droits de l’Homme et du citoyen qui sont des droits constitutionnels. Une atteinte scandaleuse au travail des journalistes qui enquêtent sur des sujets d’utilité publique et qui, en l’occurrence, n’ont même pas eu la possibilité de répliquer aux arguments développés par l’avocat du maire de Saint-Etienne.   

La CFDT-Journalistes condamne l’instrumentalisation de la justice dans cette décision qui s’assimile à une procédure-bâillon. Cette ordonnance est d’autant plus inquiétante qu’elle s’inscrit dans la continuité de la loi sur le secret des affaires, qui vise à museler les médias d’investigation. Début octobre, une autre procédure, devant le tribunal de commerce de Nanterre, avait interdit au média Reflets.info de publier la suite de son enquête sur le groupe Altice et son président, Patrick Drahi.

La CFDT-Journalistes exprime son soutien à ses collègues de Médiapart et s’associe à tous les défenseurs des libertés publiques. En France, la censure n’existe plus. Ne la laissons pas revenir insidieusement. La CFDT-Journalistes demande expressément au gouvernement que ce sujet, essentiel, soit évoqué lors des Etats généraux du droit à l’information qui devraient s’ouvrir en décembre.

Les actualités

  • Une proposition de loi sécurité globale contre la liberté de la presse

    La proposition de loi dite de « sécurité globale », déposée par la majorité gouvernementale, entend interdire la diffusion, par tous moyens, de l’image d’un policier, d’un gendarme ou d’un militaire en opération, dans le but de porter atteinte à leur intégrité physique ou psychique. Ce texte est une réponse clientéliste du ministère de l’intérieur…

  • « Sécurité globale » : LDH et Journalistes demandent le retait pur et simple

    Communiqué commun Une proposition de loi sécurité globale contre la liberté de la presse   La proposition de loi dite de « sécurité globale », déposée par la majorité gouvernementale, entend interdire la diffusion, par tous moyens, de l’image d’un policier, d’un gendarme ou d’un militaire en opération, dans le but de porter atteinte à leur intégrité physique ou psychique.…

  • Renouvellement de la carte de presse : dématérialisation et plus grande souplesse

    La campagne de renouvellement de la carte de presse a débuté le 3 novembre 2020. Les titulaires ont reçu un courrier de la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels (CCIJP) leur indiquant la marche à suivre. Quelques nouveautés et possibles confusions nécessitent de faire le point. LES FRAIS : AVANCER OU NON LA PART EMPLOYEUR ?…

  • Proposition de loi Sécurité collective : un texte inacceptable contre la presse et les journalistes

    Le groupe parlementaire LREM a déposé une proposition de loi sur la sécurité collective qui devrait venir en discussion dans les jours à venir. Ce texte, élaboré sans aucune concertation avec les organisations syndicale de journalistes, porte atteinte à la liberté de la presse et au libre exercice de la profession de journaliste. En effet,…

  • Avec ou sans carte de presse, quelles sorties pour les journalistes ?

    « La carte de presse suffit pour les déplacements des journalistes : il n’est pas utile d’avoir en plus une attestation de l’employeur. Les autres personnels de rédaction peuvent se déplacer avec une attestation permanente de l’employeur. » C’est ce qu’a indiqué le ministère de la Culture aux syndicats de journalistes, après consultation de la cellule de…

Enable Notifications OK No thanks