Nouveau schéma national du maintien de l’ordre : des avancées pour les journalistes

Le nouveau Schéma national du maintien de l’ordre (SNMO) a été présenté aux organisations syndicales de journalistes par les ministères de la Culture et de l’Intérieur ce lundi 6 décembre 2021.

CFDT Journalistes se félicite des avancées concrètes contenues dans ce document pour faciliter le travail et la protection des journalistes lors des manifestations.

Télécharger ici : le chapitre du SNMO concernant les journalistes.

Ce nouveau SNMO est l’une des suites du rapport Delarue, sur les relations entre la presse et les forces de l’ordre. Des relations qui s’étaient fortement dégradées ces dernières années, l’ancien SNMO ne prenant guère en compte les spécificités de la profession, assimilant les journalistes aux manifestants sitôt l’ordre de dispersion donné par les forces de l’ordre. Une situation inacceptable, les journalistes étant particulièrement fondés à documenter et témoigner à la fois de la tenue des manifestations, mais aussi des opérations de maintien de l’ordre.

Totalement réécrit par le ministère de l’Intérieur, grâce notamment à la contrainte d’un arrêt du Conseil d’État, le nouveau schéma rétablit les journalistes dans leurs prérogatives de témoins, mais missionne aussi les forces de l’ordre pour assurer leur protection si nécessaire.

Très concrètement, le SNMO rappelle aux autorités administratives la place particulière qu’occupent les journalistes en matière d’information et de libertés publiques, sachant qu’ils sont là pour rendre compte de la situation de terrain. Dès lors, des droits particuliers sont à leur accorder :

• l’identification par signes distinctifs : le port d’un brassard ou d’un équipement « presse » doit être considéré comme une présomption d’identification ; l’identification des journalistes passant d’abord par la carte de presse de la CCIJP (dont la primauté est réaffirmée), mais aussi par la carte de presse internationale délivrée par la Fédération internationale des journalistes ; où pour les journalistes non-titulaires de la carte de presse et leurs accompagnants, d’une attestation « employeur » dont le formulaire entrera en application au 1er janvier 2022.

• la mise en place d’un canal dédié d’information : lors des rassemblements les plus importants, un officier sera chargé des relations avec les journalistes ; les journalistes n’ont en revanche aucune obligation de se faire connaître à cet officier.

• la liberté de circuler librement : les journalistes présents lors des rassemblements peuvent se déplacer librement dans la manifestation, se trouver entre forces de l’ordre et manifestants, ou se placer du côté des forces de l’ordre. Ils peuvent continuer à exercer leur mission lorsque l’ordre de dispersion est donné aux manifestants, mais devront se positionner de façon à ne pas être assimilé aux participants à l’attroupement et ne devront pas gêner l’action des forces de l’ordre. Ils ont en outre le droit d’être présents pour documenter une manifestation interdite ou non déclarée.

• la liberté de porter des protection : il est reconnu aux journalistes le droit de porter des protections, comme par exemple des lunettes de plongées ou un casque siglé « presse », à l’exclusion de protections qui ne seraient pas en vente libre (comme par exemple les masques à gaz militaires).

• le droit à la protection : les journalistes peuvent être aussi la cible de manifestants violents. En cas de besoin, ils pourront ainsi passer derrière les lignes des forces de l’ordre qui leur doivent une protection.

• droit à l’image : il est rappelé que policiers et gendarmes ne peuvent s’opposer à la captation d’images et de sons sur la voie publique, sauf concernant certaines unités spéciales. La publication de ces clichés n’est pas non plus interdite dans les limites de la loi ; serait ainsi une infraction la publication sur les réseaux sociaux d’une image de policier ou de gendarme en vue de son identification.

En marge du SNMO, le ministère de l’Intérieur prévoit aussi de « renouer le dialogue avec les journalistes » en organisant des points réguliers avec leurs représentants, mais en ouvrant aussi aux journalistes de terrain des cessions de formation des policiers et gendarmes aux maintien de l’ordre, afin de renforcer la compréhension mutuelle. Il est également prévu de former les policiers et gendarmes au droit de la presse.

Pour CFDT-Journalistes, cette prise de position forte du ministère de l’Intérieur va dans le bon sens et il était important de renouer le dialogue, après quelques épisodes difficiles. Il n’en reste pas moins que le chantier reste ouvert en ce qui concerne l’identification des journalistes. Car si cela ne pose pas de problèmes pour les titulaires de la carte de presse, de la carte de presse internationale ou les journalistes bénéficiant d’une commande (qui pourront obtenir l’attestation employeur), la question reste en suspend pour la « zone grise » du journalisme, englobant les reporters et photo-reporteurs sans commande ni carte de presse, ainsi que les vidéastes documentaristes.

Pour ceux-ci, il a été proposé de mettre en place un système d’auto-déclaration sur le modèle de l’attestation de sortie en vigueur lors des confinements. Une idée à creuser pour CFDT-Journaliste qui rappelle toutefois que si tout citoyen est légitime à documenter et à témoigner d’une manifestation, cela n’en fait pas pour autant un journaliste qui, lui, se doit d’agir avec neutralité et dans le respect d’un statut et de chartes déontologiques.

A Paris, le 6 décembre 2021

 

Lire aussi :

Mai 2021 : Relations entre la presse et les forces de l’ordre : la Commission Delarue rétablit les équilibres

Mars 2021 : Journalistes et forces de l’ordre : constats et propositions à la Commission Delarue

 

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