Marseille : une journaliste violemment agressée par un CRS

Le 27 juin dernier, une journaliste du journal en ligne “Made in Marseille” s’est fait agresser verbalement et physiquement par un CRS mobilisé pour la visite d’Emmanuel Macron dans la cité phocéenne. La CFDT-Journalistes a décidé de se porter partie civile.

Ce 27 juin 2023 près du Mucem à Marseille, une journaliste de “Made in Marseille” – qui n’était alors pas en train de travailler et se situait hors du périmètre de surveillance des forces de l’ordre – rejoignait la station “Quai de la Tourette” pour prendre vélo en libre-service afin de rentrer chez elle, comme d’autres usagers présents au même instant.

Un CRS l’a alors apostrophée, lui lançant : « C’est bloqué, tu ne vas pas chercher de vélo ! » Etant la seule à subir l’injonction, elle n’a pas compris la réaction de l’agent quand il lui a bloqué le passage. Une erreur visiblement puisque le CRS a décidé de contrôler son identité.

Sa deuxième “erreur” a été d’ouvrir son portefeuille pour en sortir sa carte d’identité sans prendre soin de camoufler sa carte de presse, repérée par le “gardien de la paix”. Reconnaissant en elle la journaliste et non plus la citoyenne lambda, le CRS a commencé à l’insulter en tant que femme puis en sa qualité de journaliste. 

Notre consœur a alors tenté d’appeler sa rédactrice en chef, qui a entendu la suite de l’altercation. « Très vite, il est passé des mots aux actes. Il y a eu des propos très insultants envers la profession, des paroles dégradantes et misogynes envers la femme. Ensuite, j’ai entendu ma collègue lui dire de ne pas la toucher, puis de la lâcher. Il a sommé notre journaliste de manière extrêmement agressive de raccrocher alors que cette communication résonnait comme un appel au secours. Visiblement, il lui a arraché son téléphone et l’a jeté à terre. Elle s’est fait saisir l’ensemble de ses affaires, jetées au sol. Elle criait, pleurait. J’ai entendu un autre CRS parler puis la communication a été coupée. »

Dans le même temps, le CRS a immobilisé sa victime par une clé à la gorge avant de la jeter à terre. L’agression a duré près d’un quart d’heure !

Plus tard, notre consœur s’est rendue à l’hôpital où les médecins ont constaté ses contusions au bras, au dos, prescrit un traitement pour sa trachée meurtrie et l’ont mise en arrêt maladie.

Dix jours après l’événement, selon la directrice générale du journal, « elle garde les stigmates physiques et psychologiques de son agression. »

Une plainte a été déposée dès le lendemain, ainsi qu’un signalement auprès de l’IGPN. 

Le 11 juillet, le parquet de Marseille annonçait l’ouverture d’une enquête pour violences en réunion par personnes dépositaires de l’autorité publique.

CFDT-journalistes dénonce une agression gratuite à l’encontre d’une citoyenne dont la seule “faute” est d’être par ailleurs journaliste. 

Ce n’est pas nouveau et a été très bien décrit dans le rapport indépendant de la commission Delarue en avril 2021

Les violences subies par les journalistes sont insupportables d’où qu’elles viennent. Elles sont particulièrement incompréhensibles venant de forces de l’ordre, qui sont là pour les protéger.

Face à cette violence aussi dégradante et misogyne que gratuite, CFDT-Journalistes a décidé de se porter partie civile.

Paris, le 13 juillet 2023

Le Conseil national CFDT-Journalistes

journalistes@f3c.cfdt.fr

La nécessite de durcir les sanctions

Rappelons que toutes ces agressions ne trouvent pas de réponse pénale suffisante. Si un journaliste n’est pas grièvement blessé (si ce sont des violences volontaires avec une ITT inférieure ou égale à 8 jours) son agresseur ne risque qu’une amende courante. Cela peut conduire à banaliser cette violence et le sentiment d’impunité, y compris de la part des forces de l’ordre. C’est pourquoi la CFDT porte depuis deux ans la demande d’une loi visant à ajouter à la liste des circonstances aggravantes le fait de s’en prendre à un journaliste dans le cadre de ses fonctions.

Les actualités

  • Stupeur et solidarité après l’agression de notre confrère photographe

    Samedi 27 février le photojournaliste Christian Lantenois était violemment blessé lors d’un reportage avec une consoeur sur une rixe dans un quartier de Reims. Il se trouve depuis à l’hôpital dans un état très préoccupant. Rendre compte des faits est le travail des journalistes, y compris quand il s’agit de tensions et de violences urbaines.…

  • Article 24 de la loi « sécurité globale » : CFDT-Journalistes adresse une lettre ouverte aux sénateurs

    Lettre ouverte à Mmes les Sénatrices et à MM les Sénateurs Depuis plusieurs semaines, la CFDT-journalistes manifeste afin de défendre notre métier. Et notre départ de la coordination nationale « Stop loi Sécurité globale » ne change rien à notre combat. Celui d’informer. Scrupuleusement. Consciencieusement. Librement. Depuis quelques semaines, cet exercice est menacé. Par l’article…

  • Je suis venu te dire que je m’en vais : ces journalistes qui quittent la profession…

      L’enquête qualitative menée sous l’égide du sociologue des médias Jean-Marie CHARON dresse un constat inquiétant. De plus en plus de journalistes, notamment des femmes, désertent la profession, après quelques années de pratique, pour des raisons de paupérisation, de burn-out, de désillusion aussi. Le phénomène n’est pas nouveau : nous connaissons tous des confrères, et…

  • Chez NRJ, vraie activité partielle ou travail dissimulé ?

    Communiqué intersyndical SNJ – SNME-CFDT de l’UES Régions du groupe NRJ (concerne notamment environ 120 journalistes de NRJ, Nostalgie et Chérie FM) 16 février 2021   Journalistes et animateurs, le virus du travail dissimulé gagne-t-il le groupe NRJ ? La crise sanitaire a le dos large. Et le personnel des antennes en a plein le dos.…

  • En Biélorussie : un procès hautement symbolique

    Communiqué de l’intersyndicale CFDT – CGT-SNJ – SNJ A Minsk (Biélorussie), deux journalistes de la chaîne Belsat, Catarina Andreeva et Darja Chulcova, vont être présentées à la justice ce mardi 9 février 2021. Elles sont accusées d’avoir, le 15 novembre 2020, appelé à manifester et d’avoir perturbé le trafic à Minsk. Elles étaient simplement là…

Enable Notifications OK No thanks